"Légalisez l'avortement en Allemagne" // Le Bundestag plus jeune que jamais | PROGRAMME | DW | 24.11.2021
  1. Inhalt
  2. Navigation
  3. Weitere Inhalte
  4. Metanavigation
  5. Suche
  6. Choose from 30 Languages

PROGRAMME

"Légalisez l'avortement en Allemagne" // Le Bundestag plus jeune que jamais

L'accès à l'avortement est toujours un parcours du combattant en Allemagne. Des femmes demandent sa légalisation et un accès aux soins plus simple. En seconde partie de cette émission, Vu d'Allemagne donne la parole aux nouveaux élus du Bundestag, parfois très jeunes !

"C'est un scandale !". Ainsi débutela pétition autour de l'avortement signée par des dizaines de milliers de personnes qui vient d’être remise à des élus en Allemagne. Une pétition initiée par Bündnis für sexuelle Bestimmung, le collectif pour l’autodétermination sexuelle, pour demander la suppression des paragraphes 219a et 218 qui encadrent la législation sur l’avortement dans le pays.

Que dit la législation allemande sur l'avortement ? 

Les paragraphes 218 et 219a sont des vieux textes de loi, toujours en vigueur aujourd'hui. Le premier l'est depuis 150 ans cette année, l'autre est hérité de l’époque nazie. 

"Le paragraphe 218 dit qu’une personne qui stoppe une grossesse sera condamnée à une peine d’emprisonnement ou une amende. Ça veut dire que l’avortement est illégal", explique Adriana Beran, co-initiatrice de la pétition à Berlin. Et de poursuivre : "Il y a cependant des exceptions, avec lesquelles l’avortement est possible et dépénalisé."

En effet, l’avortement, jusqu’à 12 semaines, est possible sous certaines conditions. Mais quand une femme se décide pour interrompre une grossesse, c'est un véritable parcours du combattant.

De multiples étapes pour les femmes 

"Le premier pas consiste à faire confirmer la grossesse par une ou un gynécologue", raconte Christine Schmidt, membre, elle aussi, du collectif pour l’autodétermination sexuelle à Münster, dans l’Ouest du pays.  "Ensuite la femme doit s’occuper de trouver un rendez-vous dans un centre publique ou religieux où elle doit alors expliquer à une personne qui lui est complètement étrangère, qu’elle ne veut pas cet enfant, qu’elle veut avorter et donner ses arguments"

Avortement, ce que vous devez savoir et prendre en compte - Une fiche d'information dans un bureau accueillant les femmes désirant avorter.

"Avortement, ce que vous devez savoir et prendre en compte" - Une fiche d'information dans un bureau accueillant les femmes désirant avorter.

Le centre d'accueil doit alors lui présenter les possibilités de poursuivre la grossesse. "On doit donc bien se justifier", regrette Christine Schmidt.

Ce rendez-vous permet la délivrance d'une attestation, obligatoire pour réaliser un avortement. La femme doit alors ensuite trouver un médecin acceptant de l'accompagner. Cette troisième étape se révèle souvent la plus compliquée. 

La peur des médecins

Les professionnels acceptant de réaliser des avortements ne sont pas répertoriés. La "publicité", c’est le mot officiel, est interdite, en vertu du paragraphe 219a. Tout juste depuis 2019, après un petit changement législatif, les professionnels de santé ont le droit d’écrire sur le site s’ils ou elles réalisent des avortements. Toute autre explication, sur les méthodes pratiquées par exemple, est interdite. Des docteurs ont d’ailleurs déjà été condamnés pour publicité sur leur site. 

Manifestation en Bavière contre l'avortement

Les membre de l'Eglise catholiques sont encore nombreux à s'opposer à l'avortement

De plus, poids de la tradition oblige, de l’Eglise catholique… Pour tout un tas de raisons, les oppositions à l'avortement sont encore nombreuses dans le pays. Ainsi, malgré la loi, de nombreux médecins n’osent même pas écrire qu’ils ou elles font des avortements sur leur site ou même en réaliser. Un casse tête pour les femmes ayant besoin d'aide. 

A Münster, ville de plus de 300.000 habitants, Christine Schmidt raconte que les professionnels qui acceptent de réaliser les avortements se comptent sur les doigts -et encore, pas tous- d’une seule main. "On avait fait un sondage auprès des médecins de la ville, pour demander pourquoi ils ne font pas d’avortements", raconte-t-elle. "Ils disent ne pas vouloir être stigmatisés, ne pas souhaiter une image d'un « cabinet avortement » et perdre leurs patients." 

Les témoignages de femmes devant faire des centaines de kilomètres, voire se rendre à l'étranger dans les régions frontalières, sont nombreux. "Dans notre Land le gouvernement estime que faire jusqu’à 150kms autour de votre domicile pour trouver un médecin pour un avortement est acceptable", s'emporte Christine Schmidt. "Ça veut dire que quelqu’un sans voiture doit prendre les transports en commun plusieurs heures, et plusieurs fois. C’est éminemment dramatique !"  

Une clinique à Babelsberg

De nombreuses institutions de santé sont gérées par des institutions religieuses en Allemagne, et refusent de pratiquer l'avortement

Des expériences parfois traumatissantes

Le collectif pour l’autodétermination sexuelle milite pour que l'avortement soit légalisé, et rendu possible chez les médecins habituels des femmes. "Psychiquement, c’est très lourd toute cette procédure. Il faut expliquer ses pensées les plus profondes à deux personnes qui vous sont complètement étrangères, ça conduit à un profond désarroi", raconte la militante de Münster, évoquant des expériences traumatisantes pour des femmes qu'elles a accompagnées dans leurs démarches. 

S’ajoute à cela pour les patientes le fait que les caisses d’assurance maladie ne prennent pas en charge l’avortement. Cela coûte jusqu’à 600€. Des aides existent pour les plus pauvres, mais ce sont encore des démarches en plus.  

Des changements à venir ?

"Interdisons donc les 100.000 avortements réalisés par an en Allemagne ", disent les opposants. Manifestations, pétitions et autres actions contre l'avortement sont régulièrement réalisées, parfois même devant des cabinets médicaux. (Le tweet ci-dessous est un extrait de reportage du magazine Der Spiegel sur la question)

"Cela ne changera rien au problème de santé publique", répond Adriana Beran. Elle cite les faiseuses d'anges, qui, durant des siècles, ont aidé d'autres femmes à avorter en Allemagne et ailleurs, avec des conséquences parfois dramatiques, voire mortelles, tant les conditions d'hygiènes étaient parfois mauvaises. 

Les militantes estiment qu'une interdiction aggraverait même le problème d'égalité sociale, les femmes les plus aisées pouvant se permettre de traverser une frontière pour avorter, quand d'autres n'auraient pas les moyens. 

Dans le monde, l’OMS estime qu’au moins 25 millions d’avortements non sécurisés, dangereux pour les femmes, sont réalisés chaque année.  

En Allemagne, les trois partis qui devraient former le nouveau gouvernement semblent d’accord pour supprimer le paragraphe 219a interdisant "la publicité" aux docteurs. En revanche les défenseurs des droits des femmes sont plus sceptiques concernant une éventuelle suppression à venir du paragraphe 218. "Je crains qu’on doive batailler encore longtemps et redescendre dans la rue", sourit Christine Schmidt. 

A voir aussi sur le sujet ↓ 

Cette chanson satirique de la rappeuse allemande FIVA et de l’actrice Maren Kroymann dénonce le fait que chacun puisse affirmer "que les vaccins rendent malades, (...) vendre des armes de guerre (...) mais pas écrire sur son site quels types d’avortements on réalise en tant que médecin". 

++++++++++++++++++++++++++++++++ 

Le Bundestag plus jeune que jamais

Bundestag

Le nouveau Bundestag compte 736 élu(e)s

En seconde partie de ce podcast, Vu d’Allemagne prend la direction du Bundestag, l'assemblée parlementaire. L’âge moyen des ces élu(e)s a baissé de trois ans, de 49 à 46 ans. Il y même des très jeunes. Alors quels sont leurs objectifs ? Que peuvent-ils apporter pour le Bundestag et la démocratie ? Reportage à Berlin de Niklas Mönch à découvrir. 

Vu d’Allemagne est un magazine radio hebdomadaire, proposé par Hugo Flotat-Talon et Anne Le Touzé, diffusé le mercredi et le dimanche à 17h30TU, et disponible aussi en podcast. Vous retrouvez tous les numéros dans la médiathèque, à écouter en ligne ou à télécharger en format MP3. Le podcast est également disponible sur certaines plateformes de podcasts.  

La rédaction vous recommande